En 1932, Gilbert et son père Lucien LEBLANC devant leur bungalow
J’AI VU ! C’était en 1932. J’avais 11 ans. Mon père, reconnaissant au naturisme d’avoir rétabli sa santé, a acheté deux parcelles au Levant et aussitôt il a commandé à un entrepreneur local un « Bungalow de série », 3mX4m, du hourdis (bois et carreaux de brique).
Il n’y avait pas de routes, seulement des sentiers piétons. C’est la cassette personnelle des Durville qui a avancé l’argent pour la construction des routes, mais le Fond de Roulement alimenté par une taxe de 1er achat ou de mutation, qui était alors de 12,5%, a remboursé les Durville par la suite.
J’ai vu Gaston Durville, juché sur une autochenille, diriger les travaux où opéraient Salvatore Murino, Saïd qui a eu les doigts écrasés, Jacquier et autres…
Parfois, Durville les payait en leur donnant des parcelles.
La source était équipée de 4 bidons (rouillés) de 200 litres, reliés par des tuyaux en roseaux.
Le port était à l’Avis. Léopold Pegliasco y avait d’inénarrables vedettes comme le Saint-Hilaire – métallique à colonnes – et la Volga II, bleue, en bois. Il y avait aussi deux pointus : le Laïssou-dire et le Ben-Hur.
La poste a été au Pénitencier, puis à Héliopolis dans un immeuble qui a nom actuel « Les Yuccas ».
Un camping de location de tentes à deux places avec lits, tenu par Augier (qui après la guerre est devenu syndic) se trouvait dans la pinède du Grand Avis : mon père et moi y avons passé un printemps en attendant que le bungalow soit construit. Y vivait aussi « Le Père Julien », apiculteur, qui cuisinait des couleuvres en disant à ses invités que c’était des anguilles. Il est devenu très vieux et s’est éteint après la guerre au camping Colombero qu’il avait vendu en viager.
Pendant ce temps-là, Durville a essayé d’électrifier Héliopolis en 110V, il y a eu des lignes de poteaux, un local pour l’électricité (qui est maintenant au siège du syndicat). Sans succés.
Pratiquement, on allait le matin se baigner à Rioufrède, où Gaston Durville animait une séance de gym, et l’après-midi au Grottes. Bref, on suivait le soleil. Je me souvien d’une ballade au Titan où on courrait nus sous la pluie pendant 8 km. On allait aussi aux Pierres de fer, à la plage des galets de la Paille…
On avait le slip dans les commerces, dans le camion, à la poste. Il n’y avait ni police des mœurs, ni problèmes.
Le camion ! Un T Ford – peut-être d’avant 14-18. Vaillant. La route était carrossable entre le port et le village. Avec nids-de-poule. Le transporteur se nommait Lassale. Sa mère, Mme Bouhout, tenait épicerie dans un local du port appartenant à Léopold Pegliosco, le père de Loulou le Corsaire, le grand-père d’Alain.
Léopold, déjà avant l’occupation naturiste, avait mission de ravitailler le phare. Ensuite, vaille que vaille, il assurait la traversée des clients vers les Lavandou.
Peu de monde. Pas de cars, on allait à pieds. Jamais on aurait imaginé qu’après la guerre et les « années de plomb », ce serait la ruée de toute l’Europe, 3000 personnes à camper et bivouaquer n’importe où, et des gens « de la haute » souvent, à faire caca dans les fosses avec deux planches !
Saint Tropez et Brigitte Bardot ne sont venus qu’après nous piquer des clients…
En ce temps là, la lutte était devenue épique entre les « textiles » et les « nudistes » pour la possession de la plage des Grottes. Un pogrome, ou plutôt une dragonnade policière, a eu lieu en 1977 contre les nudistes.
Aujourd’hui, la portion de route de l’Ayguade entre le Port et le Village est déclarée zone mixte (nudistes/textiles) au même titre que tous les chemins d’Héliopolis.
Héliopolis, Juillet 2008